Forêt Mixte : la boîte qui cache la forêt


Un jeu de Kosch, illustré par Judit Piella et Toni Llobet, édité par Lookout.


Instant Wikipedia : 

La forêt de Paimpont est une grande forêt de 9000 hectares à 30 km au sud de Rennes en Bretagne. 

Elle est composée de chênes, de hêtres et de pins, et surtout elle est assimilée à la légendaire forêt arthurienne de Brocéliande (tout de suite, ça en jette un peu plus qu’un bosquet qui sent la crêpe et le cidre)

À la base, en breton, elle est appelée forêt de Breselien et c’est par paronymie qu’on lui affuble le nom légendaire de Brocéliande. 

Elle aura été l’origine des forges de Paimpont (et de ses légendaires filles des forges lalala), et de l’extraction de minerais de fer, ce qui est plutôt pratique pour les forges. 

C’est au XIXe siècle qu’on l’associe au roi Arthur (et non à Alexandre Astier)

Outre de nombreux châteaux et manoirs, on y retrouve la tombe de Merlin (vous savez, celui qui a mis au point une potion pour réduire le temps de dessalage des filets de morue) emprisonné par Viviane après l’avoir séduit, l'Hotié de Viviane, le tombeau des druides, et surtout la Fontaine de Jouvence (alors, la Bretagne, ça vous gagne ?) pour les relier à la légende. 

Bon, au final, c’est surtout la nature qui fait le charme de ces bois, mais un peu de magie ne fait de mal à personne.


Mise en place : 3 minutes

Règles : 5 minutes

Temps de partie : 30 minutes

Âge : 8 ans

Type de jeu : optimisation, gestion de main, placement de cartes. 



Petite journée dominicale en famille, quoi de plus sympathique qu’une ballade ensoleillée dans la forêt du coin. Main dans la main avec Mme J en Doc Martens (pour éviter les entorses, et se défendre contre les anacondas qui se cachent sous les épines de pins, dangereuses les forêts du coin), on regarde Mini J passer d’un bouleau à un hêtre, d’un pin parasol à un châtaigner en s’exclamant tous les 2 pas :

👦 "Oh un bogue papa, une coulemelle maman, et là-bas un daim et 2 marcassins" (bon en vrai avec le bruit qu’il fait, les seuls animaux qui sont susceptibles de ne pas avoir changé de continent pour leurs préservations sont soit sourds, soit suicidaires)

👦 "et c’est quoi ça maman ?" 

💃 "Euh une… libertine tarifée de genre indéterminé (politiquement correcte me voilà) et une boîte de ... ballons... Mini J, regarde un aigle ! Ou pas ! Allez viens on s'en va !"

Pardon.

Bon, allez, un petit cache-cache animalier maintenant ?


Mise en place : 

Une fois le plateau forêt déployé et les cartes mélangées avec les 3 cartes hiver incorporées dans le dernier tiers du deck, chaque joueur en pioche 6 et pose une carte grotte devant lui. 

Si, sur un malentendu, un joueur n’a aucun arbre en main, il peut se défausser de ses cartes et repiocher une seule fois par partie. 

Et tout le monde est prêt pour repérer un ours brun, une chouette hulotte, un hérisson et un sanglier cachés derrière le cyprès d’en face, oui c’est un très gros cyprès, et alors une remarque ?


Le set de départ d'un joueur
Minimaliste, mais efficace


À son tour, l’amateur de déco forestière va piocher 2 cartes, sans jamais pouvoir dépasser 10 cartes en main. Ces dernières peuvent venir soit du deck face cachée, soit de la forêt face visible, dans l’ordre de son choix. 


Une fois sa main de cartes prête, le joueur devra en jouer une en la payant avec d’autres cartes de sa main, cartes qui seront mises dans la forêt, et donc accessibles aux autres joueurs. 

La forêt est immédiatement réinitialisée lorsque la 10e carte y est posée. 

Certaines cartes apportent un bonus à la pose, d’autres l’apportent en fonction de la couleur des cartes défaussées pour la payer.


Les cartes sont : 

– Des arbres obligeant à rajouter immédiatement une carte du gros deck dans la forêt. 

Il existe 8 essences d’arbres différentes scorant toutes à leur façon. 

On peut aussi placer n’importe quelle carte face cachée, cela devient une pousse d’arbre, ce qui a un intérêt limité, sauf en cas de pénurie évidente d’arbres.


– Des cartes animaux, végétaux ou champignons : ces cartes sont coupées par le milieu, soit à l’horizontale soit à la verticale, et après avoir payé en cartes la partie que l’on souhaite maintenir visible, on dissimule l’autre derrière un arbre libre en place. En théorie un arbre ne peut contenir qu’une carte sur chacun de ses bords sauf certaines exceptions (crapauds, lièvres, prostituées…). 


Exemple avec ce majestueux sapin blanc
Les icono parlent d'elles mêmes, mais elles sont nombreuses

Exemple d'une rivière de cartes

Exemple de cartes


Puis c’est au joueur suivant de jouer. 

Et etc.


🏁La partie se termine immédiatement lorsque la 3e carte hiver est apparue (soit par l’action d’un arbre soit piochée par un.e joueur.se). 


📝On compte :

- les glands rapportés par ses arbres,

- ses cartes supérieures et inférieures, ainsi que les cartes latérales de chaque arbre, chacune ayant des conditions de scoring différentes

- un gland par carte placée dans sa grotte (action permise par certaines cartes genre l’ours brun ou le blaireau). 


🏆Le joueur avec le plus de glands (et je ne parle pas de Cyril Hanouna) est sacré roi des forêts et remplacera mon beau sapin, pendant que 💀 les perdants continueront d’essayer de cacher un grizzly derrière leur ginko biloba en écoutant le vainqueur chanter des chants de Noël en plein été… Roi des forêts, mais foncièrement inadapté.


👥 À 2 joueurs, on supprime 30 cartes au hasard du gros deck avant de mélanger les cartes hiver.


👀

Niveau matériel, c’est plutôt très joli, ça fleure bon la nature et il ne manque qu’une petite odeur de sous-bois pour parfaire l’immersion (non Mme J pas besoin d'investir dans des bougies d'ambiance odeur pinède)

Après, très clairement, la lisibilité des cartes n'est pas toujours évidente, et les multiples informations lisibles de tous les côtés de la carte peuvent mettre en difficulté les TDA/H qui auront potentiellement du mal à se focaliser sur une partie de la carte sans digresser. #adhdhighwaytoheylookasquirrel


Les règles sont accessibles et claires, on apprécie le petit deck de cartes explicatives qui permet de s’y référer en cas de doute sur le pouvoir de la carte. 

On peut juste reprocher certaines précisions qui laissent planer le doute et donc les approximations lors du décompte. Par exemple : il faut 4 hêtres pour les scorer et gagner 5 points par arbre, le xylocope violet augmente de 1 le nombre d’arbre sur lequel il est posé, mais score-t-il comme l’arbre ou juste permet de scorer l’arbre même s’il n’y en a pas le nombre ?

De petites interrogations qui peuvent perturber les plus tatillons.


Ce jeu est très simple de prise en main, on pose une carte en la payant avec d’autres cartes de sa main qui deviennent accessibles aux adversaires, on la place de façon à comboter ou scorer au maximum en fin de partie. 

Les stratégies sont multiples et on s’adaptera au tirage et aux dons de l’adversaire pour la construire, les papillons qui donnent des glands selon le nombre d'espèces différentes, les marronniers qui scorent en fonction de leur nombre, les ours bruns qui remplissent notre grotte de cartes, ou les coulemelles qui permettent de piocher des cartes. 

Tout en posant sa super carte de la mort qui tue pour essayer d’égaler la diversité des bois de la Lothlorien, on veillera à ne jamais laisser la carte convoitée par un autre dans la rivière de pioche, ou au contraire de le narguer a minima en la posant comme 10ème carte de la défausse pour qu’il la regarde être à jamais inaccessible (heureusement aucune n’est unique). 


Un jeu au final, très accessible avec une mécanique simple et facilement compréhensible et un mode de fin de partie qui peut sembler violent par sa soudaineté, mais qui oblige à faire des choix décisifs avant que les Stark aient raison et que Winter is coming pour la 3e fois. 


On pourra lui reprocher 2 choses selon nous :

- le scoring, qui est souvent laborieux et chronophage, comme toutes les salades de points, mais ici uniquement final : si on n'est par attentif, on peut aisément passer autant de temps à compter ses points qu’à poser ses cartes, voire d’être à peu près sûr d’avoir oublié à la fin, nous obligeant à recompter quand il n’y a que 3 points d’écart entre les 2 forestiers. Quand les points avoisinent les 400, c’est long et fastidieux. Mr J persiste à penser qu'un décompte par symboles seraient moins pourvoyeur d'erreur. 


- certaines stratégie, que je ne vous détaillerai pas, mais qui sont beaucoup plus puissantes que d’autres, plus basées sur le hasard créant une distance entre jeune joueur qui essaye le jeu et joueur aguerri qui le regardera poser son papillon avec un petit rictus avant de poser son 3e lynx chassant son unique chevreuil de la forêt, ou au contraire majorant sa harde de cervidés pendant que l’adversaire s’évertue a créé une volière aussi futile qu’un neurone dans la tête d’un raciste… 


👉À 2 c’est mieux ? 


La réduction du nombre de cartes permet de raccourcir les parties et d’éviter qu’elles ne s’éternisent, ce qui n’est clairement pas la vocation de ce jeu qui se veut nerveux et efficace. 


Par ailleurs, la stratégie va être beaucoup, mais alors beaucoup, plus fine qu’à plus de joueurs. 

La rivière de cartes n’atteignant que plus rarement les 10 cartes, synonyme d’éviction, on sera plus regardant sur les cartes qui servent de moyen de paiement pour éviter de donner la victoire à un adversaire attentif, on aura aussi plus facilement la possibilité de miser sur une carte qui restera d’un tour sur l’autre, car pouvant être dédaigné par l’adversaire peu regardant, plus débutant ou avec une stratégie différentes de celle imaginée. 


C’est ainsi qu’à 2 joueurs, on a vu des scores dépasser allègrement les 600 points (alors pas nous, chez les J, on est plus sur le petit bois de campagne que sur Fangorn, mais on l’a vu, si si promis) ce qui sera plus exceptionnel à plus nombreux. 


Un jeu qu’on se plaira à sortir avec un petit apéro en duo pour se taquiner le marcassin en plantant des bouleaux par sa stratégie plus fine et efficace et des parties moins longues.

Il plaira aussi au plus grand nombre de joueurs s’ils acceptent de laisser la nature reprendre ses droits et perdre un peu le contrôle de leur forêt qui risquera d’être moins regardante sur la prolifération des espèces, et des parties plus soumises à l’analysis paralysis, alors qu’à 2 joueurs on est plus dans la surspécificité animalière (par exemple : que des cervidés avec 1 ou 2 espèces connexes, une forêt de marronniers, etc.). 


Au final, un jeu stratégique, d’optimisation et de programmation qui plaira à toute la famille, même aux joueurs plus experts qui se complairont dans une sur-optimisation de chaque tour, moyennant un peu d’AP sauvage. Reste à savoir si l’extension des Alpes (sans crétin) corrige ces petits défauts… 


Rien à dire, une forêt est belle quand l’animal fait loi, sans humain ni fusil pour gâcher tout ça, alors allons écouter le brame du cerf au petit matin avec un bol de Benco et des tartines de gelée de framboises. 

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