Harmonies : une partie de zenitude dans ce monde de brute.
Un jeu de Johan Benvenuto, illustré par Maëva Da Silva et édité par Libellud.
☝Instant Wikipedia :
Olympos fait parti des nombreux personnages de la mythologie grecque (et a fortiori Romaine, puisque tout ce qui est à l’un est l’autre, l’inverse n’étant pas vrai… Comme le mariage en gros).
Il serait, selon certains, le fils d’Héraclès et d’Euboe, une géante fille des primordiaux Ouranos et Gaïa. Il serait le père ou l’ami, disciple du fameux satyre Marsyas, qui fut puni par Appolon pour s’être prétendu meilleur que lui en jouant de l’aulos. Il sera alors écorché vif et sa peau clouée à un pin (il y en a d’autres qui se prétendent meilleurs musiciens qu’Appolon ? Il y a encore plein de pins sans peau dans le coin…).
Avant de mourir, Marsyas aurait appris la flûte à Olympos, qui pour le remercier lui offre une belle sépulture, et à force de jouer divinement de la flûte (mais un peu moins qu’Appolon, Olympos préférant avoir la peau sur les os que pas de peau du tout) finit par inventer l’harmonie musicale.
On espère tous que le trajet créatif de Johan Benvenuto pour la création du jeu a été semé d’un peu moins d’embûches, ou de dieux se prenant pour un Bolton…
La déesse Harmonie sera présentée lors d'un prochain article Wikipédia. Ou pas. Seul l'avenir nous le dira.
Mise en place : 5 minutes
Règles : 5 minutes
Temps de partie : 20 minutes
Âge : 8 ans
Type de jeu : agencement de jetons
Un petit plateau de jeu vierge et solitaire posé, là comme ça, sans copain meeple pour le sublimer, au milieu de la table de jeu froide.
Mais que voilà une belle occasion pour le rendre bucolique et animé!
Alors comment va-t-on s’y prendre pour transformer ce terrain aride et inerte en une harmonie naturelle avec une synergie entre animaux totémiques et paysage gracieux dignes de Ponyo Sur La Falaise ?
Et c’est ainsi que les J se mirent à bosser sur la symbiose entre bestioles et rivières clapotantes.
Mise en place :
Une fois le plateau central placé au centre de la table (sinon on l’aurait appelé plateau latéral, ou plateau qui n’est pas trop au centre…), avec la flèche dirigée vers le futur premier joueur, on place 3 jetons de bois tirés du sac sur chaque cercle du plateau vide.
On place le deck de cartes Animal mélangées à côté avec 5 cartes dans la rivière, et les cubes Animal à proximité.
Chaque joueur prend un plateau joueur vierge qu’il place sur la face de son choix, et si vous voulez complexifier la partie (et vous le voudrez bien vite), chacun prend 2 Esprits De La Nature et en garde un qui sera son animal de départ avec un cube blanc placé dessus.
Et vous voilà prêts à rendre la nature plus belle que jamais.
À son tour, le joueur actif doit récupérer les 3 jetons d’un cercle du plateau central et les placer sur son paysage. Ils peuvent être placés n’importe où sur son plateau sans règle d’adjacence.
> Les jetons gris, montagne, peuvent être empilés dans la limite de 3.
> Les jetons marrons, type arbre, peuvent être recouverts d’un deuxième tronc et/ou d’un jeton vert feuille (les feuilles peuvent aussi être placées à même le sol symbolisant un buisson).
Pour être finalisé, l’arbre doit avoir sa canopée, sinon ça devient un bout de bois sans intérêt. (En clair, un arbre est composé de 1 jeton vert placé sur 0, 1 ou 2 jetons marron (pour une taille de 1, 2 ou 3 jetons)).
> Les rouges, type bâtiment, peuvent surmonter un autre rouge, un marron ou un gris (les fondations peuvent avoir plusieurs composantes matérielles), mais ne rapporteront rien s’ils sont d’une hauteur d’une tuile.
> Les jaunes sont des champs qui ne seront comptés que s'il y en plusieurs adjacents
> Les bleus auront une règle différente en fonction du côté du côté plateau joueur choisi.
Une fois ses jetons placés, le joueur peut, dans l’ordre de son choix et sans obligation :
- Prendre une nouvelle carte Animal de la rivière et l’incorporer dans son lot de cartes Animal en cours, dans la limite de 4 (si l’Esprit de la nature de départ n’est pas encore validé, il fait partie de la limite de 4, avoir un T Rex à plumes, ça prend de la place). Puis chaque case en haut à droite de la carte est couverte d’un cube Animal.
- Valider un animal : si un motif sur son plateau, ou plusieurs, est exactement le même (en type et hauteur de jetons) que sur une, ou plusieurs cartes Animal en sa possession (même acquise à ce tour), on place un cube Animal sur l’endroit indiqué par la carte. Il ne peut y avoir qu’un seul animal par jeton, mais un jeton (même contenant une bestiole) peut servir à plusieurs réalisations animalières.
Il est en revanche interdit de déplacer ou recouvrir un animal déjà en place, et il ne sera pas non plus retiré si son environnement change et n’est plus corrélé à son habitat de départ (cela s’appelle l’adaptabilité, condition optimale pour la survie dont les J de sexe masculin sont dépourvus).
Si le dernier cube animal d’une carte est placé, elle est mise de côté, libérant ainsi la place pour une nouvelle.
🏁La partie se termine quand un joueur a 2 emplacements vides, ou moins, sur son terrain.
📝 On compte :
- la plus haute zone sans cube atteint sur chaque carte Animal en sa possession,
- éventuellement le décompte spécial de son Esprit De La Nature,
- chaque arbre rapporte des points en fonction de leur taille,
- idem pour les montagnes, mais elles doivent être acoquinées avec une autre montagne pour être décomptées (que la montagne est belle, mais pas solitaire, contrairement au vers),
- chaque groupe d’au moins 2 champs jaunes apporte 5 points (qu’il y ait 2 ou 10 champs, ça ne rapporte que 5 points),
- les bâtiments rapportent des points s’ils sont adjacents à au moins 3 types différents de jetons,
- l’eau rapporte des points selon la face du terrain choisie au départ.
> soit 1 point/tuile eau allant d’un point A à un point B en passant par le chemin le plus court de la rivière la plus longue (oui celui-là il manque d’harmonie pour être bien décompté) et sans bras de rivière,
> soit 5 points par zone séparée par des jetons d’eau formant des îles.
🏆Le vainqueur vivra éternellement dans une harmonie digne de Shaka de la Vierge, pendant que 💀 les perdants devront écouter la Cheu Cheu Synchro jusqu’à leur dernier souffle de vie… Et ça, c’est dur et leur dernier souffle risque d’arriver bien vite, car elle manque drastiquement d’harmonie cette cheucheu…
👥 Pas de modification à 2 joueurs.
👀
➕Libellud nous a toujours habitué à un matériel de toute beauté et des illustrations d’une qualité souvent incomparable.
Bien qu’ici, ils sortent de leur zone de confort avec un jeu qui n’a rien à voir avec de la communication par l’image, le matériel n’en reste pas moins splendide, ne parlons pas des illustrations des cartes qui sont top, les jetons de bois très agréables à manipuler, tout est réussi.
➖ On peut juste se demander la volonté de promettre le goodies à toutes les boutiques, pour au final n’en livrer que quelques-uns créant un marché du goodies proche du vol caractérisé.
Libellud nous avait habitué à ses exclues en Festival, concours et autres méthodes pour gagner des pions Dixit, des cartes Dice Forges, mais là, cette technique fait assez mesquine, et j’espère juste que c’est lié à une erreur de communication et de gestion du stock qu’à une volonté de créer un marché de l’occasion à grand coup de vente de reins, pour les collectionneurs compulsifs.
Les règles sont très claires, même si certaines cartes esprits demandent à être relues plusieurs fois pour être comprises.
La mécanique du jeu n’est pas sans rappeler l’excellent Dreamscape sorti il y a quelques années faisant les débuts de Sylex (dont un article traîne rêveusement quelque part sur ce blog https://adeuxcestmieuxjeuxdesociete.blogspot.com/2021/09/dreamscape-voyage-poetique-en-contree.html ). On a un territoire sur lequel on essaye de reproduire des paysages avec des jetons bigarrés et d’y placer des animaux au lieu de son rêveur.
La vraie différence vient de l’accessibilité, là où le jeu du rêve fleurait avec l’expert, ici la prise en main est rapide, et la pureté des mécaniques le rend beaucoup plus accessible et familial sans retirer la substantifique moelle du jeu.
💫Jouer avec l’Esprit, bien que déconseillé par les règles pour les premières parties, donnera une orientation aux stratégies du joueur.
Certains vous inciteront à faire des champs pour voir butiner Mme J, pardon, les papillons, d’autres plus citadines aiment les bâtiments, ou encore la hauteur de montagne ce qui entraînera forcément le choix des bestioles en conséquence.
💭Oui, si vous faites des champs partout, votre bouquetin risque de se brouter les cornes par la racine au milieu des épis, de même s’il y a de l’eau partout, on sera plus enclin à sentir la truite et la vaginose que le dromadaire.
La prise en main rapide permet de jouer et d’y rejouer avec tout le monde et sans jamais lasser, même si le nombre de cartes semble succinct, on a quelques parties devant nous avant d’avoir l’impression de tourner en rond (après, Libelllud est assez adepte de sorties de deck de cartes extensions).
De plus, en jouant sur différentes faces du plateau, on modifie sa stratégie aqueuse suffisamment pour ne pas négliger les 5 points d’une île (et si on en score 1, on en score forcément 2, je laisse le soin aux plus matheux d’expliquer aux autres pourquoi), alors que la rivière, moins lucrative, pourra être plus facilement mise de côté au profit d’une forêt fournie en séquoias géants.
Libellud sort de sa zone de confort en éditant Johan Benvenuto, plus connu pour l’immense série des Codex ou Secret Identity, mais aussi Lost Seas, Mù ou Cowboy Bebop, et il s’en sort à merveille pour le plus grand plaisir des joueurs et des amateurs de belles images (et le goodies T Rex n’apporte en vrai pas grand-chose, mais c’est un dinosaure donc il est indispensable @__@) qui passeront du bon temps avec une interaction quasiment nulle à décorer et pourvoir en bestioles leur paysage, et aussi le rendre encore plus harmonieux qu’une symphonie de Mini J en hurlement majeur…
👉Alors, à 2 c’est mieux ?
L’interaction dans Harmonies est, il faut bien l’avouer, proche du néant.
On crée chacun dans son petit coin de paradis (sans coin de parapluie) se faisant fi du paradis adverse.
Et c’est seulement quand l’un des joueurs annonce la fin de partie qu’on lève son nez du clapotis de la rivière pour tilter qu’il nous reste qu’un seul tour pour vider son arche de Noé et remplir notre paradis de lapins bondissants, de chouettes hulottes hululantes et de huppes fasciées puputantes.
À 2 joueurs, l’offre pléthorique de trio ne sera que rarement bloquante lors des choix adverses, et l’observation du jeu adverse sert surtout à prévenir l’arrivée du terme de la partie qu’autre chose.
Les plus hargneux pourront décider de réduire l’offre pour augmenter l’interaction négative entre les joueurs, mais clairement ce n’est pas le but premier de ce jeu, après tout il s’appelle « harmonies » pas « coups de p*te au paradis » et regarder Eve faire de la compote des pommes d’Adam et lui couper le serpent sous le nez n’est pas son ambition première.
Au final, un jeu que l’on aime sortir avec tout type et tout nombre de joueurs pour le plaisir de tous, et nul doute que Libellud, comme à son habitude, se fera du beurre, harmonieux d’accord, mais lucratif quand même, sur quelques probables futures extensions.
La beauté, c’est être en harmonie avec ce que l’on est.
On peut dire qu’ici Johan Benvenuto illustre parfaitement la maxime de Peter Nivio Zarlenga.
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