The Vale Of Eternity : un délicicieux melting-pot mythologique


Un jeu d’Eric Hong, illustré par Jiahui Eva Gao et Stephano Martinuz, édité par Mandoo Games et Blackrock Games.


Instant Wikipedia : 

Le syncrétisme n’a au final rien à voir avec le fait de canoniser Donald Trump en nouveau Saint Crétin, mais consiste en un rassemblement de doctrines disparates, même s’il est majoritairement utilisé dans un contexte religieux. 

À la base, ce terme provient du grec et signifie « union des crétois » pour nommer leurs coalitions guerrières. 

On l’utilise dorénavant en histoire des religions pour qualifier des confessions dont leurs composants d’origine sont reconnaissables. 

Par exemple, l’idée d’une vie post mortem hébraïque serait liée à leur captivité en Égypte où ils auraient fusionné dans leur croyance le principe de préexistence des âmes d’origine zoroastrienne (rien à voir avec le fait de signer d’un Z de la pointe de son cierge)

On retrouve beaucoup d’exemples plus connus, comme la cohabitation entre le bouddhisme et le shintoïsme au Japon qui créeront le shinbutsu shugo qui consiste en un mixe de kamis et de bouddhas. Ainsi les Japonais célèbrent les mariages et naissances selon des rites shintoïstes, alors que les décès sont célébrés selon des rites bouddhistes. 

Le caodaïsme est aussi un beau mélange entre le vaudou traditionnel et le christianisme. 

Si on revient au jeu, ce mélange d’êtres de croyances diverses et disparates pourrait s’apparenter à un syncrétisme ludique du plus bel effet.


Mise en place : 3 minutes 

Règles : 5 minutes 

Temps de partie : 20 minutes

Âge : 7 ans 

Type de jeu : gestion de main, gestion de ressources 



Il y a fort longtemps Odin, Vili et Vé créèrent la Terre avec les restes du corps d’Ymir.

A moins que ce soit Izanagi et Izanami... 

Comment ça, Brahma l’a fait aussi, et Viracocha ? 

Ah non, ne me dites pas que Chaos l'a créé, et Chou et Tefnout ont fait un gosse qu’ils appellent Terre itou… 

A ce train là, on va finir avec autant de Terre que de dieux dans la cosmogonie mondiale et niveau guerre des religions, on va être servi… 

Ce que je vous propose, c’est de prendre ce stock de créateurs de Terre de légendes, on les mélange tous ensemble et on choisit ce qui nous va dans chaque religion et comme ça, tout le monde est content. Perso, je vais prendre le Valhalla nordique... Coucou les Valkyries, la sympathie de Dyonisos, à la sérénité de Ganesh, le repas avec du bon vin de Jésus et pourquoi pas les 100 voyages, pardon expéditions de Mahomet. 

Comment ça, ça marche pas comme ça une religion ? 

Pourtant j’ai bien l’impression que certains font dire ce qu’ils veulent à la religion et en oublient d’autres principes… 

Bon bah puisque je ne peux pas croire comme je veux, viens Mme J, allons jouer avec ses divinités pour se faire plaisir avec toutes les mythologies en même temps sans faire de jaloux, et puis si jamais vous avez une envie subite de me vénérer, je vous y autorise.


Mise en place : 

Une fois le plateau coloré placé au centre de la table et le deck de cartes mélangé, on place les pièces de valeurs 1, 3, et 6 en piles séparées devant. 

Chaque joueur prend les 2 jetons Capture de sa couleur et place son marqueur score au départ de la piste éponyme. 

Pour finir, le joli et volumineux dragon blanc (mais pas aux yeux bleus, désolé Yugi) peut être placé où on veut, il ne sert qu’à faire joli. 


Le plateau central

La piste de score

Les cartes 

Vous voilà fin prêts à capturer tous les divinités et autres kamis de provenance multiculturelle du jeu.


En début de manche, on place autour du plateau 2 cartes/joueur piochées du deck central. 

Elles sont placées en respectant les couleurs. 


Pour commencer la chasse, on fait la phase de capture.


Chaque joueur va placer son premier jeton de capture sur une carte autour du plateau dans l’ordre du tour, puis dans l’ordre inverse les joueurs placeront leurs deuxièmes jetons sur une carte. 

Le dernier joueur place donc ses 2 jetons d’affilée. 

Chaque carte ne peut accueillir qu’un seul disque en son sein, on n’est pas chez les Lannister, que diable.


Puis, dans l’ordre du tour, les joueurs choisiront une action parmi 4, et ce jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de carte autour du plateau et que tout le monde passe.  


Les actions possibles :


— Prendre une carte sur laquelle un de ses jetons patiente. 

La carte rejoint ainsi sa main, sans limite de cartes, pour chanter Kumbaya avec les divins de tout bord dans tous les dialectes imaginables. 


— Vendre une carte sur laquelle on a posé un jeton. 

Elle rapporte les pièces indiquées sur le plateau face à elle. 

On ne peut jamais avoir plus de 4 pièces en main, et ce quelque soit leur valeur. 


— Adopter une divinité de sa main. Pour cela on paye son coût, attention la divinité ne rend pas la monnaie, c’est un dieu, pas l’épicier du coin. 

Puis la carte est placée dans sa ferme divine, mais il ne peut y voir plus de cartes dans sa ferme que le numéro de la manche en cours (à la 5e manche, on n’alignera que 5 êtres mystiques maximum), il y aura donc au maximum 10 cartes jouées en fin de partie. 

Une fois placée, on active son pouvoir s’il s’agit d’un pouvoir immédiat uniquement. 


— Renvoyer une carte de son cheptel dans ses pénates. 

Pour libérer un peu de place dans son champ, on peut renvoyer une carte devenue inutile dans la défausse en payant une valeur équivalente à la manche en cours (désolé Gorr, tu n’avais pas besoin de ta nécrolame pour te débarrasser des importuns profiteurs, juste d’un peu de sous). 


Une fois que tous les attrapeurs de dieux ont décidé de passer, chacun peut activer à tour de rôle et dans l’ordre de son choix les cartes devant lui ayant un symbole d’activation (donc pas celles activées lors de leur arrivée, petit malin), à hauteur d’une fois chacune, en les inclinant. 


Puis on redresse ses cartes et on passe à la manche suivante.


Mme J remporte la victoire

Le plateau Score en fin de partie
Les 42 pierres magiques qui servent de monnaie

Mr J baguenaude dans la vallée
Perdant la partie


📝🏁La partie s’achève soit à la fin de la manche où un joueur dépasse 60 points, soit à la fin de la dixième manche. 


🏆Le joueur victorieux parcourra la terre entière à la recherche des Kamis et leurs mystères, du secret de leurs pouvoirs, enfin tout ça quoi, pendant que 💀les perdants resteront à la maison à écouter le professeur Chen déblatérer des inepties dans son kamidex qu’ils ne pourront jamais utiliser…


👥 À 2 joueurs, seules 4 cartes seront disponibles à chaque manche. 


👀

Ce qui frappe le plus sur le matériel, c’est la franche réussite des illustrations.

Les deux artistes ont réussi à parfaitement se coordonner pour que leurs styles soient différenciés, mais que tout reste cohérent et harmonieux dans de magnifiques tons pastels. 

Le reste du matériel reste assez simple, de très bonne qualité, avec des règles et une iconographie claire et facilement appréhendable.


Cette mécanique de pièces en nombre limité et non en limitation de valeur est très intéressante et assez nouvelle dans le jeu. 

Elle me rappelle mon enfance où je regardais ma petite sœur avec mes 3 pièces de 1 franc (oui, je suis vieux et alors, déjà je parle en nouveaux francs et c’est déjà pas mal) en lui proposant un échange on ne peut plus subtil avec sa malheureuse et solitaire pièce de 10 francs amenée par la petite souris, bah oui elle avait 3 pièces et moi une après l’échange, j’étais forcément perdant mouhahaha tout cet avenir de politicien qui s’ouvrait à moi et pourtant avorté… 

Bref, on se retrouve donc en partie dépendant du tirage de cartes, que ce soit de leur couleur, leur coût ou leur pouvoir, mais aussi de son stock de pièces et il faudra jongler avec tout ça tout en prenant en compte les desiderata adverses.


Chaque tour, on hésitera sur quelle carte prendre en main, laquelle revendre, et tant pis pour les derniers adorateurs des gorgones, et quand surseoir à son action pour économiser en espérant jouer 2 cartes au tour suivant. 

L’hésitation est toujours là, mais ne ralentit pas des masses le jeu et chaque partie se retrouve assez serrée et tendue bien que nos talents de chasseurs ne nous aient jamais permis d’approcher les 60 points…


Un jeu avec une belle rejouabilité, et nul doute que l’extension doit y contribuer en sus, et qu’on prend plaisir à sortir pour se taquiner le dragon.


👉Alors, à 2 c’est mieux ?


À 2 joueurs, le nombre de cartes est plus limité donc forcément les stratégies seront un peu plus liées au hasard. Par exemple, on peut ne pas voir de carte violette pendant plusieurs manches, il faudra donc s’adapter pour avoir les bonnes cartes pour changer ses 1 en 6 (même si je maintiens que je préfère changer l’eau en vin, c’est plus utile), pour piocher des cartes sans passer par le plateau central, etc. 


Par ailleurs, comme souvent dans ce type de jeu, la notion d’antijeu peut être plus présente.

💭Comment ça, Mme J gagne des points avec les cartes roses, bah tant pis pour Aerys le dragon violet, je vais plutôt jeter mon dévolu sur Freyja juste pour la revendre au marché de Volentis sous le regard fumasse de ma partenaire qui s’empressera de faire de même avec mon dragon. 

Les stratégies se font et se défont à chaque manche, et il faudra bien calculer son coup pour damer le pion d’une Mme J au porte du Nirvana…


Coups bas indirects, mais quand même bien présents donnant une saveur toute particulière à ce jeu qu’on aimera sortir à 2 comme à plus pour créer un conclave divin éclectique surpuissant et rassembler toutes les religions autour de soit dans la paix, l’amour, et la bière… comment ça, il ne faut pas rêver… je vais peut être devenir gourou de secte, du coup…


Notre père qui êtes dans la ludothèque,

Que votre partie soit bonne,

Que la joie claironne, 

Que votre chance vienne,

Que votre stratégie soit bonne en duo ou à plus nombreux,

Pardonne-nous nos défaites comme nous te pardonnons d’avoir triché,

Ne nous laisse pas retourner vers le Monopoly,

Et délivre nous de l’analyses paralysis,

À TOI

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