Oltréé : le petit fort ne va pas fort...


Un jeu d’Antoine Bauza et John Grümpf, illustré par Vincent Dutrait et édité par Studio H.


Instant Wikipedia 

Un fortin est un petit fort, ne pouvant abriter que quelques personnes et construit en des points militaires stratégiques. Les premiers fortins sont construits en 1398 à Norwich avant de pulluler sur les côtes britanniques pour les protéger des navires ennemis. 

De base, il s’agissait d’une tour de pierre surmontée par un bastion jusqu’en 1651 où ce type de bâtisse a arrêté d’être construit. 

Lors de la Première Guerre mondiale de nombreux fortins ont été construits à bon escient sur la ligne de l’Est, pendant la Seconde Guerre mondiale de nombreux fortins auront été construits sur la ligne Maginot et la ligne Siegried à moins bon escient. 

De nos jours, le terme utilisé est casemate, blockhaus pour les Allemands et bunker pour les Anglais (vous remarquerez que le terme français est rarement utilisé…), ces nouveaux fortins des temps modernes sont semi-enterrés et donc plus résistants à l’artillerie lourde. Après ils sont moins décoratifs, je préfère de beaucoup les fortins le long du mur de Winterfell que les casemates des plages de Normandie…


Installation : 20 minutes 

Règles : 15 minutes 

Temps de partie : 1 heure

Âge : 12 ans

Type de jeu : coopération, narratif, résolution de quêtes.



Déménager est toujours une épreuve, on se retrouve plein de cartons dans un lieu à rénover où l’on ne connaît personne, avec une Mme J les cheveux dressés sur la tête parce qu’il y a des cartons, que ce n’est pas rangé, qu'il y a des saletés partout dont une grosse trace de boue dans l’entrée. Mr J cherche le carton où se cache Ark Nova pour faire une petite partie plutôt qu’enlever la tache de boue sus-citée, et mini J est déjà en train de retourner tout ce qui peut l’être… 

Avant que ce trio déchaîné ne fasse fuir tous les voisins, il est tant d’aller se présenter avec une carte de visite de ce merveilleux blog, quitte à dire "bonjour" autant se faire de la pub, et rendre quelque services pour entrer dans une nouvelle communauté… 

Comment ça pour s’intégrer, il faut dératiser le vieux fortin d’à côté ? Vous vous êtes crus dans Final Fantasy ?! Non… Ha.


Mise en place 

Une fois le fortin déployé avec les patrouilleurs en son cœur, les marqueurs défense et prestige aux niveaux 3 et toutes les ressources autour avec les dés et bâtiments à construire, on déplie le plateau annexe sur lequel on place la chronique de son choix, on ajoute les tokens uniques à la chronique, les cartes problèmes et événements, puis on y place 1 mission (soit au hasard, soit de notre choix). Mélangez ensuite les cartes péripéties indiquées dessus et placez en 3 par zone du plateau principal, et le reste sur le plateau annexe. 

Chaque joueur prend son plateau « patrouilleur » avec la vie au maximum, chacun ayant un pouvoir, un métier propre, et une provision. 


Le personnage de Bérénice
Ayant un dé métier artisan

Tous les personnages avec leurs meeples

Les magnifiques meeples

Les dés : 
- le noir est le dé localisation
- le dé marron : le dé adversité
- et les autres sont les dés métier

Les cartes événements 

Les cartes problème

Exemple de cartes péripéties

Les différents types de cartes péripéties

Tuiles bâtiments

Les cartes Chroniques et Mission

Les tours et les tours fortifiées

Il ne reste plus qu’à faire de notre Dol Guldur personnel un petit nid douillet nettoyé de tout Nazgul de passage.


La partie se déroule au tour par tour, chaque joueur fait l’ensemble de son tour avant de passer la main à son voisin.


À son tour, le joueur commence par faire avancer l’histoire, pour se faire, il lance le dé adversité et fait avancer le marqueur d’autant. La zone d’arrivée peut :


— Faire tourner une page de la chronique pour nous rapprocher du dénouement final, modifier la mise en place ou les actions, déplacer les joueurs, faire apparaître un dragon et vous roussir les sourcils, enfin du classique dans les villages du coin… 


— Faire apparaître une nouvelle péripétie dans un lieu défini par le dé 8 associé (dé localisation). 

À la 4e péripétie, on rajoute un marqueur de danger sur la zone faisant baisser d’un la renommée du fortin à chaque début de tour tant qu’il est là. À 0 de renommée, c’est la défaite immédiate, votre fortin devient la risée de la Terre du Milieu. 


— Faire apparaître un problème : il est mis au hasard du dé sur une zone bloquant l’aide du peuple tant qu’il n’est pas résolu. 


— Faire apparaître un nouvel événement modifiant les règles à plus ou moins long terme. Et c’est plus souvent une inondation bloquant un territoire qu’un doux soleil vous donnant un teint hâlé augmentant votre charisme dans la taverne d’à côté. 


Une fois les ennuis constatés… Le joueur peut effectuer jusqu’à 2 actions différentes, 3 en défaussant 2 provisions. 


— Se déplacer, soit du fortin vers n’importe quelle région et vice versa, ou d’une région vers une région adjacente. Pas très vaillant le cheval… 


— Demander de l’aide aux habitants d’une région où l’on se trouve : cela permet de récupérer des ressources, de les échanger, de récupérer toute sa santé ou d’augmenter la défense ou la renommée du fortin. Si l’un ou l’autre tombe à 0, c’est la défaite immédiate sous l’hilarité des nobliaux du coin. 


— Construire un bâtiment dans le fortin en y étant placé. On défausse les ressources et on construit le bâtiment sur une case libre ou une tour. On peut aussi réparer un bâtiment abîmé par une mésaventure en cours de partie, attaque de lapin vampire, chute de météorite impromptue, il se passe un nombre d’emmerdes incroyables dans cette Satrapie, on se croirait dans La Petite Maison Dans La Prairie. 


— Résoudre un problème posé sur une région pour avoir à nouveau accès au pouvoir du peuple, soit en défaussant des ressources soit avec des réussites aux lancés de dé. 


— Résoudre une péripétie : pour cela un autre joueur prend la carte du dessus de la région du chevalier et lit la petite histoire. Le joueur actif devra résoudre ensuite un lancé de dé métier en fonction du symbole sur la carte péripétie. Il y a un dé de base offert par le fortin, et éventuellement d’autres en fonction des bâtiments construits et du métier du chevalier. En fonction du nombre de réussites, on récupère les gains (ressources, renommée, défense…), ou on subit les affres de la défaite (perte de ressources, de renommée…), quoiqu’il arrive la péripétie est défaussée par la suite. 


S’il n’y a plus de péripétie sur une région et que la tour associée est bâtie, alors cette dernière est sécurisée pour la fin de partie, permettant souvent d’avancer sur la mission choisie. 


Puis c’est au joueur qui suit de faire avancer l’histoire jusqu’à son dénouement, en bien ou en mal.

Les succès aux péripéties sont souvent essentiels pour arriver victorieux à la fin de la partie.  


💀La défaite est prononcée immédiatement si :

- la défense tombe à 0 (devenant la proie de toutes les armées du coin) 

- la renommée tombe à 0.


🏆📝Et c’est seulement après avoir survécu à tout ça que la victoire pointe le bout de son nez et que nos braves patrouilleurs peuvent dormir dans leurs lits de plume douillets, avant d’être réveillés par l’arrivée impromptue d’une vouivre albinos de 7 mètres, qui comme de par hasard, a décidé d’amener ses 12 enfants dans la tour du fortin… c’est quand même ballot, surtout que la région n’en avait pas vu depuis le dernier alignement des planètes survenant une semaine des 4 jeudis… 


Certaines chroniques rajoutent des actions, ou un objet en plus, bref on vous laisse découvrir. 


À 2 joueurs, au moment de la mise en place, on rajoute dans le fortin 2 bâtiments au choix parmi : la caserne, la bibliothèque, la taverne et l’atelier. 


👀

Le matériel est juste magnifique, que ce soit sur les illustrations de Vincent Dutrait (dont, pour ceux qui en doute, nous sommes ultra fans), les ressources, meeples, bâtiments, etc. 

Tout est superbe et donne envie d’être manipulé au maximum pour le plaisir des yeux et des doigts. 

Les règles sont accessibles même si écrites dans un agencement inhabituel, une fois en main on s’y retrouve vite, une petite aide de jeu aurait été bienvenue tout de même, pour finaliser le tout.  


Histoire d’être pointilleux sur l’univers du jeu, je sais qu’on est dans du médiéval fantastique, mais bon, j’ai du mal à comprendre l’emploi du terme fortin qui, pour ceux qui ont méprisé éhontément l’instant Wikipédia, n’est qu’un bâtiment fortifié d’avant-garde ne pouvant contenir plus de quelques gardes plutôt que le terme "place fortifiée" qui aurait été plus à propos. 

Idem pour le terme de Satrapie qui historiquement était des régions administratives en Perse antique alors que l’histoire est plus moyenâgeuse… 

Je sais, il s’agit de détails, mais cela baisse un peu notre immersion dans l’univers, Jean Louis Relou à toujours quelque chose à redire, oui c’est moi… 


Un jeu coopératif exigeant où il faudra s’adapter aux aléas des vicissitudes de la vie de la Satrapie (on dirait une phrase des Inconnus) pour réussir ne serait-ce qu’à voir la dernière page de l’histoire. 

En effet, entre les péripéties, les problèmes et les événements tombant de manière très aléatoire, mais soyons honnête, strictement uniquement dans la région la plus éloignée possible des patrouilleurs, les faibles gains en cas de victoire (oui, désolé quand vous chassez le lapin dans la forêt du coin, lapin qui a volé les carottes du père Maggotte, vous revenez au mieux avec de la fourrure, au pire une baisse de renommée parce qu’il s’est enfui, il ne s’agissait pas des lapins de Rosgobel apportant vitesse et moult trésors aux chasseurs), et le faible nombre de provisions acquises en cours de partie, qui permettent une troisième action quand elles sont mangées par paire, donnent parfois l’impression d’une très grande difficulté, voire semble impossible. 

Une fois arrivés au dénouement, le dernier combat peut à nouveau sembler insurmontable si :

> on n’a pas réussi suffisamment à avancer la mission (consistant à sécuriser les alentours du fortin dans la majorité des cas, avec une ou 2 constructions de bâtiments), parce que l’avancée de l’histoire a été trop rapide,

> si les bâtiments construits n’apportent pas les bons dés métiers en fin de partie, 

> etc...

Et après une partie galère, il peut être frustrant d’avoir l’impression d’une lutte impossible contre le dernier monstre qui nous balaie sans même se retourner avant de s’endormir dans notre salle au trésor sous la montagne… 


Certaines parties roulent toutes seules et donnent une impression de fraîcheur et de facilité feinte, on s’enhardit, on augmente la difficulté, et là, c'est le drame, vous vous apercevez que vous faites l’effet d’un pet de dindon avec votre épée contre le dragon du coin, pour finalement retourner bien vite chasser le lapin au Super U du coin. 


Au final, un jeu très beau, d'une grande qualité, mais à la difficulté en partie liée à l’aléatoire des dés qui peut lui donner un côté frustrant et l’impression de ne jamais voir la conclusion des chroniques tant le sort peut s’acharner, mais la victoire n’en est que plus belle.


👉Alors, à 2 c’est mieux ? 


À 2 joueurs, l’ajout des bâtiments de départ pour augmenter les dés métiers de certaines actions, bâtiments choisis en général en corrélation avec les métiers des patrouilleurs des joueurs, permettent d’éviter une trop grande part d’aléatoire lors de la résolution des péripéties. 

En effet, il y a plus de chance d’avoir une réussite avec 2 voire 3 dés qu’avec 1, mais quand le sort s’acharne et que tout nécessite de la magie alors que vous préférez le bricolage et les œuvres littéraires alors tant pis, autant changer de fortin et allez se boire une bière à Fort-Le-Cor au lieu de regarder à l’Est tous les matins en espérant que l’aube ramène Gandalf plutôt qu’une pluie de sauterelles… 


Ce jeu m’a rappelé un peu les débuts des différents Final Fantasy (pas sur le côté RPG, il ne faut pas abuser), on est censé sauver l’humanité d’une terrible menace, mais au départ on va chasser le pangolin nain pour amuser la galerie et ramener le chat du directeur, on récupère des fleurs pour décorer la salle du bal et si on fait un pas de trop sur la carte, on se retrouve d’un coup contre 2 Xylomid qui buvaient une verveine l’air de rien et qui t’éclatent la tronche en 2 coups de cuillères à pot. 

Ici, c’est un peu ça on passe de la péripétie mignonne qui te demande de ramasser des châtaignes pour la soupe du curé du canton et celle d’après il faut vaincre un groupe de brigands armés d’arbalètes automatiques en adamantium… J’exagère un peu, mais au final, certains tours à la difficulté très inégale peuvent avoir un côté relativement frustrant, et une impression de lutter contre un ras de marée avec une pelle et un sot King Jouet… 


De plus, le fait d’être 2 ou 4 ne change pas grand-chose à la partie quand le sort s’acharne, on subit la partie, alors que quand les dés sont dans notre sens la partie devient hyper agréable et on a envie d’y retourner rapidement… 


A 4 joueurs, l’avancée de l’histoire peut être extrêmement rapide si chaque joueur fait des doubles flèches aux lancés de dé adversité, et les chroniques plus longues seront donc plus adaptées. 

Ici, on préfère à 2, malgré le côté parfois laborieux, on est obligé de travailler de concert, l'effet leader n'existe presque pas, chacun est essentiel, les attaques ciblées efficaces sont incontournables. 


Au final, un jeu aux parties inégales, qui peut être frustrant par sa difficulté pas toujours contrôlable, mais où le matériel et l’originalité des mécaniques donnent envie de creuser l’histoire et d’y revenir pour tenter de faire mieux que la fois d’avant, de tester avec de nouvelles missions, ou juste de changer de patrouilleurs.

Parfois, on a besoin de Jon, et parfois de Sam, tout dépend si on est assailli par des Marcheurs Blancs ou des bouquets de persil… 


Les ténèbres s'amassent, et voici que débute ma garde. 

Jusqu’à ma mort, je la monterai. 

Je ne prendrai femme, ne tiendrai terres, ni n’engendrerai aucun enfant. 

Je ne porterai de couronne, n’acquerrai de gloire. 

Je vivrai et mourrai à mon poste. 

Je suis l’épée dans les ténèbres. 

Je suis le veilleur au rempart. 

Je suis le feu qui flambe contre le froid, la lumière qui rallume l’aube, le cor qui secoue les dormeurs, le bouclier protecteur des royaumes humains. 

Je voue mon existence et mon honneur à la Garde de Nuit, je les lui voue pour cette nuit-ci comme pour toutes les nuits à venir. 


Après un serment pareil, on espère des sauvageons, et pas des corbeaux qui mangent les semis paysans pour briller aux yeux de la plèbe...

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