Nouvelles ContRées : ou comment réunir mes deux passions en un seul moment.


Premier jeu de Winzenschtark (aperçu une fois dans un très bon scénario d’Unlock), magnifiquement illustré par Jeanne Landart (Cartaventura, entre autres œuvres) et édité par Olibrius Editions, qui signe son premier jeu (à part un murder passé inaperçu) et nominé à l’As D’Or, ça promet.

Instant Wikipédia : un marque page, ou signet, est un morceau de papier, de tissu ou de carton (en vrai, une chaussette, ça marche aussi, mais ça donne moins envie d’y retourner) permettant de retrouver une page (alors oui, il valait le coup cet instant Wikipédia, n’est-il pas)
Il est quand même notable qu’il existe un salon international du marque ta page à Malot-Les-Bains (c’est près de Dunkerque et ça vend du rêve) depuis 1999 pour les achats et ventes de signets, et encore plus spectaculaire depuis 2017, le 25 février est la journée internationale du marque-ta-page et ça, c’est l’info utile du jour.

Mise en place : 5 minutes
Règles : 5 minutes
Temps de partie : 30 minutes à 1 heure. 

Pour cet article, nous avons essayé le jeu avec 50 nuances de Grey. 
Autant vous dire que c'était...inattendu.

Toi qui est bibliophile, toi qui viens de poser ton campement dans ton livre préféré à regarder les mots voler pour t’emmener au pays des rêves, de l’aventure, de l’amour, enfin ailleurs quoi, voilà que d’un seul coup, le sens du livre, que pourtant tu connaissais par cœur, change. 
Il n’est plus ce que tu en pensais, il a un Sens Caché, et pour le trouver il faudra retrouver la Cité Perdue cachée quelques pages plus loin. 
N’écoutant que ton courage, rameutant les copains, te voilà avide de lecture, prêt à partir à l’aventure sans craindre les déconfitures, pour comprendre cette nouvelle littérature (là, je commence à caler sur les rimes en -ure, et Ben Hur ça colle pas trop, ni ordure d’ailleurs). 

Nous parlerons du jeu avec tous les modules. 

Pour jouer, votre première action sera de choisir un livre, n’importe lequel, mais avec un minimum de  200 pages (vous pouvez donc ranger T’choupi chez les nudistes), n’importe quel livre, mais vous vous marrerez probablement plus avec Justine de Sade qu’avec Madeleine de Proust (après chacun sa compagnie de prédilection).
Ensuite, il faut placer votre camp de base et votre éclaireur à n’importe quelle page du livre (mais à au moins 90 pages de la fin), puis placer l’un des marque-pages Cité Perdue à 50 pages du camp de base. Placez un marque-page mission au début du livre. 

De bas en haut : 
Marque-page Mission Joker, 
Marque-page Cité Perdue, 
Marque-page Eclaireur, 
Et marque-page Feu De Camp.

Sur la table, placez la boîte de jeu avec son plateau à encoches dessus rappelant les phases du tour, ainsi que les lettres de l’alphabet (le nombre dépendra de la difficulté choisie). 

Boite-plateau, 2 en 1, très bien pensée

Placez la pile d’Exploration au centre, face cachée, avec un marque-ta-page aux différents points cardinaux, la pile Péripéties et la pile Missions, toutes face cachées, et dévoilez les 5 premières missions. 
Pour finir chaque lecteur choisira un personnage pour l’aider dans l’aventure.

Marque-pages Exploration

Marque-pages Péripéties... Pas faciles faciles hein !!

Marque-pages Missions : il faut avoir une excellente mémoire !

Les personnages

Maintenant que votre bagage est prêt, vous pouvez rechercher la Cité Perdue tel un Indiana Jones dans la bibliothèque d’Ursino.

Chaque tour de jeu, un joueur sera l’éclaireur pendant que les autres constitueront le groupe. 

L’éclaireur prend la boussole et le livre (en essayant de ne pas faire tomber tous les marque-ta-pages), il va avancer le marque-page Eclaireur (situé avec les copains au camp de base) d’un nombre de pages égal à celui noté sur le dos de la pile des marque-pages Aventure.
Il pourra se rajouter une difficulté en prenant une péripétie pour aller plus vite, mais plus difficile la lecture sera… 
Une fois la page trouvée, il lit dans sa tête les six premières lignes (et non pas phrases) de la page de droite (tant pis si elle commence au milieu d’une phrase et fini au milieu d’un mot, c’est les six premières lignes et c’est tout). 
Puis il essaye d’associer le passage à un marque-page Aventure en indiquant secrètement lequel sur sa boussole. 

La boussole, un peu relou si vous ne la fixez pas assez bien...

Le groupe, entre deux cervoises autour du feu, va se répartir les missions, une par joueur. 

Une fois cette phase finie, l’éclaireur va définir s’il retourne son personnage pour bénéficier de son pouvoir ou non, puis il lit de sa plus belle voix les six lignes avec plus ou moins de contraintes si une péripétie est en jeu (c’est à ce moment que le choix du livre est important, 50 nuances de Grey avec les beaux-parents peut installer un certain malaise, sans parler des gloussements du neveu de 12 ans. Il vaut mieux donc pour les parties en couple, ou entre amis, après vous faites ce que vous voulez, cela ne nous regarde pas !).

Le groupe devra faire attention au fond et à la forme du texte. 

À la forme, car un membre du groupe et un seul pourra donner une de ses missions pour la valider s’il pense que le critère est réussi. 
En cas de réussite, le marque-ta-page Mission va dans le livre avec ses consœurs, et en prime le joueur ayant réussi sa mission pourra réactiver sa carte personnage. 
En cas d’échec, on perd la mission et trois lettres. 

Au fond, car ils devront faire ensuite un conciliabule pour trouver quel marque-page Exploration a choisi l'éclaireur (un peu à la Dixit).
En cas de réussite, le groupe (et donc le feu de camp) rejoint l’éclaireur et se rapproche de la Cité Perdue, on rajoute le marque-page choisi dans le livre. 
En cas d’échec, l’éclaireur rentre penaud au feu de camp en perdant 12 lettres au passage (au cas où, il y en a 26 en tout, juste au cas où bien sûr, enfin ça c’est en mode très facile bien sûr), on peut aussi défausser une mission réussie ayant le bon symbole pour n’en défausser que 6, voire deux missions pour conserver toutes ses lettres (vous comprenez maintenant l’intérêt de se souvenir s’il y a une esperluette dans le texte ou trois accents graves). 

Puis on refait le plein de missions, d’aventure et on continue la balade littéraire. 

L’éclaireur change à chaque tour. 

Si l’éclaireur arrive sur la Cité Perdue alors il la retourne et lit son texte avec des contraintes plus ou moins surprenantes. 
En cas de nouvelle réussite, les joueurs prennent tous les marque-pages et choisissent celui qui se rapproche le plus du titre. 
Ils avancent d’un nombre de pages noté à son dos, et la première phrase complète (majuscule et point en gros) est le secret du livre, et c’est la où ceux qui joue avec l’Assommoir de Zola se retrouve avec une phrase de 22 lignes (Zola, ce n’est pas du secret de primaire) alors que ceux qui le fond avec 50 nuances de Grey se retrouvent avec "il faut que j’aille chercher ma voiture". Ce qui somme toute est un peu décevant, vous en conviendrez, en même temps vu le livre… (au cas où, je précise, c’est la bibliothèque de madame J…). 

ATTENTION, PHOTO INTERDITE AUX MINEURS

Exercice de lecture et surtout d'écoute, assez complexe s'il en est, car entre gloussements et hoquets, allez donc vous concentrer sur le fond et la forme...👀😇😅

Si jamais on arrive à court de lettres, c’est perdu pour tout le monde, la Cité reste perdue et vous vous retrouvez à lire en boucle la biographie de Patrick Sébastien sur un fond musical du Petit Bonhomme En Mousse, et d’essayer de trouver le secret de Mary Kimberley dans Secret S72.

Les règles permettent de débuter le jeu en douceur avant d’ajouter péripéties, personnages, décompte de points, le tout divisé en 5 modules pouvant être combinés à souhait, il est précisé que l’expérience de jeu sera complète avec tous les modules.


À 2 joueurs, le groupe est donc composé que d’une personne, ce dernier n’ayant qu’une carte mission possible à chaque tour. 


Olibrius et Winzenschtark signent leur premier jeu, et quel jeu. 
Ce dernier associe tout ce que l’on peut rechercher dans un jeu, l’originalité (ce qui n’est pas forcément une mince affaire de nos jours où les mécaniques sont visitées et revisitées), la beauté du matériel où l’illustratrice rivalise d’ingéniosité sur un format très inhabituel, et la simplicité, pas de règles à rallonge, pas de partie de 2 heures où il faut 5 tours pour comprendre quoi faire. 
Non, ici, il suffit d’un bouquin quel qu’il soit (même un dictionnaire ferra l’affaire permettant de savoir que pantaculer n’est pas la dernière insulte inventée par les lovcraftiens…), de joueurs (du ludophile dernier degré à ta belle-mère toute combinaison fonctionne), et d’une bonne vue (bah oui ça reste de l’analyse d’image sur un marque-page, le daltonien presbyte sera peut être en difficulté) pour passer une heure de jeu agréable et amusante. 

Il y a un mode permettant de calculer un score final pour être le meilleur groupe de livrexploreurs de la bibliothèque, après comme dans beaucoup de ces jeux, le plaisir vient dans le jeu et pas vraiment dans le scorring, après chacun voit son plaisir où il veut, et peut aimer la biographie de Nabilla, on ne le jugera pas. Bon on ne jouera pas avec lui non plus, il ne faut pas abuser non plus. 

L’association d’un livre avec une mécanique à la Dixit permet de gommer les défauts de ce dernier : la timidité, le syndrome de la page blanche, le "j’ai pas d’idée" qui peut bloquer certains joueurs. 
Ici, pas besoin d’idée, c’est le livre qui la donne et le choix est restreint à 4 marque-pages pour ne pas trop se disperser. 
Niveau rejouabilité, il suffit d’un nouveau livre, voire juste d’un nouveau départ dans le même livre pour renouveler la partie, encore une fois une belle réussite. 

Vous pouvez jeter un oeil sur le site d'Olibrius, plus de photos de matériel et des vidéos à la clé.

Olibrius note la définition d’OLNI en page de garde de son site internet, et Nouvelles ContRées en est un exemple idéal, mérite-t-il l’As D'Or, n’ayant pas testé tous les jeux de la catégorie, je ne me prononcerai pas, mais il réussit à créer une nouvelle mécanique en en mélangeant d’autres et ça faisait longtemps que ça ne m’était pas arrivé sur la découvert d’un jeu, depuis Dixit peut-être dont on connaît l’évolution… 
Oui je suis dithyrambique, et des fois ça fait du bien de ne voir que le bien. 

"Ouiiii, bonjour, ici la brigade des anti-dithyrambiques, nous nous manifestons, car il faut arrêter d’être toujours positif , vous prions de bien vouloir donner un défaut à ce jeu, en vous remerciant !"

Ah, saperlipopette, coincé...

Le défaut est minime, mais j’ai toujours un peu de mal avec le jeu qui te fournit du matériel qui ne sera jouable qu’avec la future extension, cela donne un peu l’impression de la jouer "appât du gain" plutôt que de le vendre complet dès le départ un peu plus cher.
Le fait qu’Olibrius ne soit pas bien implanté dans le milieu, et que ce type de jeu n’est pas forcément vendeur de prime abord, explique qu’il faut courir un risque financier modéré pour survivre dans un monde en éternel renouvellement, mais les jetons de ponctuation donne un très léger goût d’inachevé. 

"Humm, bon allez, ça ira pour cette fois vous pouvez continuer votre critique, mais attention on vous tient a l’œil".

 *#ladroguec'estmal*

Alors, à 2 c’est mieux ? 

Ce jeu est à mi-chemin de tout, du parti-game, du jeu de plateau avec le livre comme plateau de jeu, d’association d’images, etc. Du coup ce jeu est bien si les personnes avec qui on joue sont sur la même longueur d’onde, et recherche un plaisir simple et efficace. 
Alors, quel que soit le nombre de joueurs c’est bon, très bon et truculent. 

Il rentre aisément dans mon top jeu dans son style (comment ça, son style est unique, donc forcément c’est facile d’être numéro 1 quand on est seul... Oui peut-être, mais il aurait pu être le dernier quand même, et puis sans antépénultième, il n’y a pas d’avant-dernier).

Fier bibliovore, il est temps de partir à l'aventure, sonder vos romans les plus intimes pour en trouver un Sens Caché !!

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Northgard : Uncharted Lands et ses extentions : mangez des pommes qu'il disait...

Vindication : il est méchant monsieur Brochant, mais plus pour longtemps.

Earth : sans humain, la terre est plus folle.