Tekhenu : l'Obélisque du soleil : faut savoir prendre de la hauteur !

Un jeu de Daniele Tascini et David Turczi, illustré par Jakub Fajtanowski, Michal Dlugaj et Zbigniew Umgelter, le tout édité par Pixie Games.


Instant Wikipedia : 

Le jugement de l’âme est un procès où le défunt doit comparaître pour définir ses droits à la vie éternelle (rien que ça) en Égypte Antique. 

Le jugement de Maât apparaît dans le livre des morts avec le papyrus représentant la pesée du cœur. 

Le défunt se présente au tribunal, sans avocat, son cœur est posé sur la balance par Anubis, le dieu chacal, ce dernier posant sur l’autre plateau une plume d’autruche, symbole de la rectitude de Maât, déesse de l’harmonie, de la vérité et de la justice, le résultat étant consigné par Thot, le dieu ibis. 

Le tribunal est composé de 12 dieux : Harmakhis, Atoum, Shou, Tefnout, Geb, Nout, Isis, Nephtys, Horus, Hathor, Hou et Sia. 

Si Thot constate des péchés, alors le cœur et l’âme sont dévorés par Ammout (qui doit être plus qu’obèse vu la conjoncture humaine), dans le cas contraire l’âme est présentée par Horus à Osiris qui lui conférera le statut de bienheureux. 

Il y a une autre version dans le livre des morts où le mort devra annoncer à 42 juges qu’il n’a pas commis 42 péchés, pour être défini comme pur.

Dans les 42 juges, il y a Troglodyte, à qui il faut annoncer qu’on n’a jamais été de mauvaise humeur… 

Ils ne connaissent pas le matin, les Égyptiens, pour annoncer un tel mensonge ???


Mise en place : 20 minutes

Règles : 30 minutes

Temps de partie : 1 h 30 à 2 heures



Noble dans l’ancienne Égypte, vous réfléchissez tranquillement à la mort quand vous vous dites que vous n’avez pas forcément respecté les 42 préceptes des juges, du coup, pour pas qu’Anubis fasse le chacal avec votre âme (oui, elle est facile celle-là), vous vous lancez avec les copains nobles (et quelques esclaves qui donnent leur aide de leur plein gré, contre des coups de fouet) dans la construction du temple d’Amon-Râ, et du temple religieux d’Ipet-Stout (ce n’est pas de la bière)

Il vous faudra probablement plusieurs vies pour y arriver, mais Osiris vous attendra. 

C’est donc parti pour devenir le plus pur des nobles pour mourir en bienheureux dans l’autre monde sans être mangé par Ammout (Chanel, les vieux comprendront)…


Mise en place : 

Une fois l’immense plateau de jeu en place avec l’obélisque érigé sur son emplacement : 

- placez 3 dés pris au hasard dans le sac dans chaque section de l’obélisque, chaque dé a une couleur et doit être placé en fonction de celle-ci dans la partie pure, impure ou interdite en fonction du lieu où il échoit, lumineux, sombre ou obscur

- on place les bonus d’Horus au hasard sur leurs emplacements ainsi que les bases des colonnes de Râ sur leur emplacement

- on place les cartes de Thot sur les 2 premières sections colorées du plateau, face visible

- on place les 2 jetons de compte-tours à 4 et 8 emplacements de la flèche du pourtour de l’obélisque

- le florilège de ressources, scribe, jeton foi est placé à côté du plateau.


Chaque joueur prend un scribe et un jeton or, son plateau, colonnes, bâtiments et statues, qu'il faut placer sur leurs emplacements, et place son marqueur de score sur 10. 

Chaque joueur place son meeple population et son meeple bonheur sur leurs positions de départ. 

Il reçoit enfin 2 cartes objectifs et n’en garde qu’une. 


Le plateau joueur bleu
On vous fait grâce des multiples photos car il y a pléthore de matériel


On retourne les cartes de début de partie en fonction du nombre de joueurs et les cartes foi. 

Chaque joueur prend 2 cartes de début de partie définissant leurs ressources de départ, mais aussi l’ordre du tour. 

Puis ils prennent, dans l’ordre du tour, une carte foi donnant une nouvelle ressource et un nombre d’ankhs départageant les égalités lors des jugements de Maât.


Et c’est parti pour essayer de devenir une âme pure qui dans le ciel s’élève (hommage à Raiponce, qui n’a rien à faire ici…).


La partie se déroule en 2 décomptes, un décompte en 2 jugements de Maât, un jugement en 2 rotations, une rotation en 2 tours, un tour en 2 AVC…


Un tour consiste à prendre un dé autour de l’obélisque, sauf un dé interdit. 

Si le dé est pur, il faudra le mettre à gauche de la balance, et à droite s’il est impur.


Avec ce dé, on fait au choix : 


> On fait l’action du dieu correspondant à la section du dé choisi. 


— Horus : permet de construire une statue de son plateau en payant du granit. 

Les statues sont soit : 

- en l’honneur d’un dieu : elle est placée sur le pourtour de l’obélisque donnant le bonus correspondant au dieu choisi sur la piste d’Horus, quand un adversaire fait le pouvoir du dieu honoré

- en l’honneur du peuple : la statue est placée dans le marché ou autour du temple donnant un or (ressource joker), et des bonus lors des décomptes, nous l’appellerons la Grande Allée Avec Plein De Statues.


— Râ : permet de construire des colonnes, en fonction de la valeur du dé, vous prenez l’un des 3 socles du plateau (donnant plus ou moins de PV), que vous placez dans le temple attenant. 

La section de l’obélisque en face de Râ donne le bonus du socle s’il est de la même couleur que le socle, puis on gagne les ressources contenues sur la case où est placé le socle, ainsi que des PV en fonction des bâtiments dans son axe et si les couleurs du socle correspondent au couleur des socles voisins.😵 

Pour finir, vous placez votre colonne sur le socle, ça ne soutient rien, mais c’est joli.


— Athor : dépensez du pain pour construire une maisonnette autour du temple (l’architecture coûtait une bouchée de pain à l’époque), vous donnant une ressource indiquée sur chaque case dans la ligne ou colonne de la bâtisse, et 3 points par colonne à soi. 

Par ailleurs, vous augmentez la population de la valeur du dé indiqué, ce qui permettra d’avoir accès à de nouvelles cartes de Thot. 


— Bastet : la valeur du dé vous donne de 0 à 2 scribes (et c’est une bonne situation), et si vous dépensez 2 papyrus, vous pouvez avancer votre marqueur bonheur de la valeur du dé sans jamais dépasser votre marqueur population.


— Thot : en fonction de la valeur du dé, dépensez de 0 à 2 papyrus pour récupérer de 1 à 3 cartes dans une seule section accessible (cela dépend de votre population). 

Les cartes donnent soit un bonus unique, un bonus permanent ou un décret de fin de partie. 


— Osiris : contre un bonheur, vous construisez un bâtiment sur le marché dépendant de la valeur du dé (oui, travailler rend l’égyptien triste, ça doit être le fouet ou la chaleur, Râ seul le sait), permettant d’augmenter la production de ressources, et d’en récupérer aussi par la même occasion. 


On peut aussi faire une action spéciale Anubis en dépensant 2 scribes pour prendre n’importe quel dé (pur, corrompu ou interdit) et faire n’importe quelle action avec, le dé sera placé sous la balance et non sur un plateau (un peu cheater, d’avoir le dieu de la mort dans sa poche).


> Ou on récupère des ressources.


On prend les ressources correspondant à la couleur du dé (jaune, papyrus, blanc calcaire… les gris ne peuvent pas être pris pour prendre des ressources), et on récupère le nombre de ressources associé à la valeur du dé. Si le nombre de ressources dépasse votre valeur de production de la ressource (vous savez l’action Osiris, que vous avez méprisée bande de mécréants), l’excédant est mis du côté impur de la balance et ne pourra être dépensé (l’avidité vous perdra).


On pourra à tout moment dépenser un scribe pour modifier un dé de +/-2.


Un plateau central très dense mais assez clair
Il est difficile de faire des choix !


Quand les joueurs ont tous 2 dés, on fait une rotation, pour cela, on tourne l’obélisque jusqu’à la prochaine ligne, déplaçant les zones d’ombre et de lumière et donc l’agencement des dés. 

On ajoute des dés dépendant du nombre de joueurs sur chaque zone d’ombre, tu vois la zone d’ombre mon fils…


Quand 4 dés sont sur chaque plateau joueur, on arrive au jugement de Maât. 

Chaque joueur compte les points des dés purs auxquels est soustrait la somme des dés impurs et des ressources excédentaires. 

On place notre jeton sur l’échelle de Maât en fonction de la valeur résultante, plus on est proche de 0, plus on est neutre et on sera le prochain premier joueur, les valeurs négatives peuvent faire perdre des points. 

Les jetons foi permettent d’équilibrer la balance dans un sens comme dans l’autre. 

Les égalités sont départagées par les ankhs des cartes foi récupérées au jugement précédent. 

Une fois le premier joueur défini, il choisit à nouveau une carte foi, on remet les dés dans le sac et on refait une rotation.


Au 2e jugement, on fait un premier décompte, chaque joueur prend les points :

- par majorité dans chaque colonne du marché d’Osiris

- en fonction des bâtiments et colonnes du temple, 

- des statues érigées et des bâtiments construits, 

- des pistes de productions remplies, 

- de l’avancement du marqueur bonheur, 


Ensuite, chaque joueur paye des pains en fonction du nombre de bâtiments (juste une bouchée de pain…).


Lors du deuxième et dernier décompte, on rajoute jusqu’à 3 cartes décrets (elles doivent avoir un symbole différent) et les points pour le plus neutre sur la piste de Maât. 


Le vainqueur rejoindra le panthéon égyptien et pourra se réincarner dans la prochaine saison de Moon Knight, les perdant eux seront mangés par Ammout et réapparaîtrons dans le remake pakistanais de la Momie 23…


À 2 joueurs : on place dans le sac 4 dés de chaque couleur, sauf pour les gris où on en place 6. 

Les statues d’Horus donnent des bonus quelque soit le joueur qui fait l’action du dieu associé, on réduit à une statue par dieu. 


Mme J, en bleu (comme d'hab'), a remporté la victoire

Mr J, dépassé par la suprématie de Mme J
En même temps, il est TOUT LE TEMPS de mauvaise humeur...

Comme toujours dans les jeux de David Turczi, le matériel est foisonnant, de belle qualité et agréable à manipuler. 

L’ensemble est un plaisir ludique et visuel et cet obélisque érigé au centre donne une vraie superbe au plateau, qui même si chargé donne un rappel de règles et d’iconographies parfaitement imbriqué dans les graphismes les rendant discrets, mais pertinents. 

En parlant de règles, comme souvent avec Pixie, pour pouvoir jouer il faudra aller consulter la FAQ pour les correctifs de règles (en particulier sur le mode 2 joueurs), cela reste très dommage compte tenu du prix et de la qualité du jeu, de ne pas avoir les finitions de règles associées. 

Vous trouverez les erratum ici : https://www.pixiegames.fr/board-dice/470-tekhenu-3701358300435.html

Malgré cet accroc, les rappels permanents des règles sur le plateau rendent les parties fluides et n’entraînent que peu de retour au livret. 

De plus, l’ensemble des cartes et jetons est expliqué en fin de livret, évitant les interprétations hasardeuses.


Les auteurs nous ont habitués aux gros jeux avec de nombreuses mécaniques imbriquées avec la série des T de Tascini (Teotihuacan, Tanabusi ou Tz'olkin entre autres), ou les magnifiques Anachrony, ou encore le plus récent Bitoku de Turczi. 

Ici leurs habitudes ne changent pas, on est sur du bon gros jeu qu’il faudra prendre en main et nécessitera quelques parties avant de le trouver fluide.


Chaque action est imbriquée : si je veux augmenter mon bonheur, il faut que j’augmente la population, pour cela il faut du pain pour les bâtiments donc aller au marché, sans oublier les papyrus qui se récupèrent avec les colonnes ou au marché. 

Dois-je faire une action d’Anubis en sacrifiant 2 scribes, mais risquer de déséquilibrer la balance de Maât et ne pas réussir à trouver l’équilibre spirituel... 

Et par-dessus toutes ses hésitations, dans quel ordre faire mes actions pour éviter que les adversaires prennent les meilleurs dés, les emplacements des statues ou de colonnes qui m’arrangent, sans oublier de garder une domination sur les marchés… 

Je vous avais dit que le risque d’AVC était présent.


Au final, chaque tour est source d’hésitation et de doutes avant de faire l’action et de la regretter 5 minutes après, mais comme tout le monde aura poireauté 2 plombes avant de jouer, on ne vous autorisera pas à revenir en arrière.

Les premières parties peuvent sembler lourdes et laborieuses tant le champ des possibles est vaste, et une fois le cap passé, les mécaniques assimilées et leurs enchevêtrements aussi, le jeu gagnera en fluidité et les joueurs gagneront en vélocité. 


Les stratégies étant aussi nombreuses que le panthéon égyptien (non je n’exagère pas, 700 stratégies différentes ne me semblent pas trop…), la rejouabilité est assurée et les black-out aussi…


👉 Alors, à 2 c’est mieux ?


À deux joueurs, les aménagements même légers permettent de maintenir l’interaction constante et de garder les tensions sur toutes les actions, en particulier en maintenant l’intérêt des statues d’Horus. 

Par ailleurs, on évite d’avoir un temps important de réflexion, qui, à plus de joueurs peut sembler très long, au point de voir l’obélisque se ramollir et le sommeil venir…


Alors oui, ce jeu est mieux à 2, car plus tendu et l’attente moins longue.

Après, pour qui n’a pas peur de voir ses papyrus dépérir en attendant d’être utilisés au prochain tour, ce jeu est adapté à 3 et 4 personnes aussi, mais j’avoue qu’attendre mon tour 30 minutes a le don de me lasse, que Khonsou en soit témoin…


Prêt à mettre votre cœur sur la balance et vous tourner l’obélisque ?  

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