Ark Nova : Beauval à la maison, hype transitoire ou kif à long terme ?


Un jeu de Mathias Wigge, illustré par Dennis Lohausen, Loïc Billiau et Steffen Bieker, édité par Super Meeple.


Instant Wikipedia : 

Dès l’antiquité, il existe des formes de zoos privés, qui sont surtout des collections d’animaux montrant la gloire et la puissance du propriétaire, la Rome antique les utilisant pour combattre (alors ils avaient plus d’ours et de lions que de loutres et de tortue, mais il est vrai qu'un combat avec une belette n'aurait pas beaucoup de panache dans le Colisée), les Grecs étaient plus dans l’idée religieuse avec un ou deux sacrifices, voire partenaires sexuels de Zeus, mais c’est une autre histoire. 

Il faudra attendre la Révolution Française pour que les collections privées, symbole de noblesse et despotisme, soient confisquées et confiées en 1794 au Musée National d’Histoire Naturelle pour que le peuple puisse en profiter.

En1831, le reste du monde imite la France avec la création du parc zoologique de Londres. 

Il faudra attendre 1950 pour que certains éthologues se disent que, quand même, garder un troupeau de rhinocéros dans une cage, ce n’était pas des plus sympathiques, et commencer à créer des environnements adaptés à chaque espèce. 

C’est à la toute fin du 20e siècle que les zoos deviennent un conservatoire d’espèces menacées en constatant que la faune et la flore commencent à pâtir de l’action humaine. 

Ils œuvrent depuis dans la préservation des espèces et leur réintroduction dans leur milieu naturel. 

30 siècles pour se dire qu’une cage pour un animal sauvage, ce n’est pas l’idéal, il n’y a pas à dire, la pensée humaine va vite…


Installation : 15 minutes

Règles : 20 minutes

Temps de partie : 2 heures à 2 h 30.



Avant de commencer, sachez que sur le site Super Meeple, vous trouverez un Erratum, et les règles corrigées, avec aussi un glossaire, et une liste des icones : https://www.supermeeple.com/nos-jeux/arknova/


Amoureux des animaux sauvages et de la diversité, vous vous lancez dans la création d’un parc animalier, mais pas n’importe quel parc, on n’est pas au bois de Vincennes.

Non, vous vous lancez dans un parc à renommée internationale avec objectif de sauver la population animale en voie de disparition par vos congénères. 

Une fois l’emplacement choisi, il ne tient qu’à vous de construire les enclos dignes d’un 4 étoiles et de récupérer les plus belles espèces, histoire d’attirer la population et autres mécènes pour financer votre rêve philanthropique. 


Quel parc sera le plus populaire ?

Vous aurez deux heures pour le déterminer. 


Mise en place :

- pour commencer, il faut déplier l'immense plateau 

- installer le tas de cartes zoo dessus, ou appelé ici "le gros deck" où on trouve plein de choses de dedans

- mettre 4 jetons bonus au hasard,


Le plateau, qui a l'air tout petit, mais qui ne l'est pas du tout
Côté "joueurs côte à côte"

Dans le gros deck, voici les cartes animaux

Dans le gros deck, voici les cartes mécènes 

Dans le gros deck, voici les cartes associatives 
qui peuvent être piochées lors de la partie, 
et rajoutées à celles existantes


Puis chaque joueur : 

- prend un parc, identique ou asymétrique,

-  pioche 8 cartes pour n’en garder que 4 (ou les drafter si on est dans la team relou), 

- 25 crédits, 

- place 3 assistants dans la zone de réserve et un sur sa zone de stockage ou bloc-notes avec les crédits,

- place 7 cubes sur la zone indiquée sur le plateau, 

- puis place au hasard ses 5 cartes actions en dessous du parc avec la carte "animaux" en 1, 

- puis récupère 2 cartes objectifs finales, 

- il place ensuite ses 3 marqueurs sur les cases de départ des pistes d’attrait, de conservation et de réputation. 




Quelques exemples de plateaux différents

Tous les bonus de résolution d'objectifs
Vous pourrez constater que les bonus sont différents selon les plateaux


Pour finir, on place le plateau d’association avec les zoos partenaires, les universités et un nombre de projets de conservation de base dépendant du nombre de joueurs. 


Tous les tokens restants sont mis dans les casiers de rangement à côté du plateau (facilitant grandement et l’installation et le rangement). Vous êtes maintenant fin près pour sauver la biodiversité de la planète en essayant de soutirer de l’argent aux touristes et mécènes de passage.


Super Meeple vous présente de façon claire et concise : 
la mise en place en jeu côte à côte !


Il n’y a pas à proprement parler de manche dans ce jeu, les joueurs font une action l’un après l’autre jusqu’à la pause café, avant de reprendre jusqu’à ce que l’un des joueurs voit son jeton de la piste d’attrait croiser son jeton de la piste de conservation. 


Les actions sont représentées par les cartes sous le plateau zoo, leur puissance dépend de l’emplacement de la carte (de 1 à 5) et de si elles ont été améliorées


Les actions possibles 


Cartes : permet soit de piocher des cartes et d’en défausser une partie, ou non; soit de saisir une carte, c’est-à-dire prendre une carte de son choix parmi celles présentes sur les zones de réputation. 

Améliorer la carte permet de saisir plus facilement, de prendre plus de cartes et d’aller au bout de la zone de réputation. Quand on fait une action carte-t-on avance le jeton pose de deux cases. 


Construction : permet de construire un enclos vide dans son parc moyennant 2 crédits par case de l’enclos (de 1 à 5, on mettra plutôt le lézard à corne dans le petit enclos et le troupeau d’éléphants dans le grand, je vous rappelle qu’on aime les animaux autrement qu’au barbecue). 

Si la tuile est posée sur une tuile bonus, on récupère immédiatement le bonus associé. 

Améliorer cette carte permet de construire tous les types d’enclos (volière et vivarium), et de construire sur toutes les zones du parc (sauf dans l’eau ou sur les montagnes). 


Animaux : permet de placer des animaux dans son zoo (oui oui, promis le but c’est pas juste de placer des enclos)

Il faudra en payer le prix, respecter les conditions de pose, près de l’eau ce qui est mieux pour un hippopotame, ou de la montagne pour un bouquetin, être associé à un continent spécifique, etc., et d’avoir un enclos vide de la bonne taille (on évite le dragon de Komodo en liberté, c’est pas Jurassic Park, ici)

Certains animaux ne peuvent pas être posés si on n’a pas amélioré la carte (tout zoo ne peut pas avoir un aspirateur des mers alias dudong chez lui)

Une fois posé, on fait immédiatement le pouvoir de la bête s’il en a un, puis on monte sur les pistes d’attrait, de conservation et de réputation en fonction de l’animal joué. 

Il est plus lucratif, mais plus cher, d’avoir des pandas dans son zoo que des cochons poilus par exemple. 

Améliorer la carte animaux, en plus de pouvoir tous les jouer, permet aussi de jouer des animaux directement de la ligne de réputation en fonction de sa réputation moyennant un coup supplémentaire. 


Mécène : permets soit de jouer une carte mécène donnant bâtiment spécial/bonus de pose ou de fin de partie/etc; soit de récupérer des crédits en fonction de l’emplacement de la carte mécène et contre une pose équivalente au montant gagner. 

Améliorer permet en plus de jouer des cartes mécènes du plateau central.


Associatif : permet de faire une action en fonction de son nombre d’assistants, et comme pour les autres de son niveau. 

La première action demande un assistant, la deuxième si elle est identique en demande 2, etc. (en même temps, on a au max 4 assistants donc le "etc" est assez limité)

Au niveau 2, on récupère 2 niveaux de réputation. 

Au niveau 3, on peut s’associer à un zoo d’un autre continent (donnant accès à nouveaux animaux et des rabais sur le coup d’animaux du même continent).

Au niveau 4, on devient partenaire d’une université (donnant des symboles de recherche et la possibilité d’avoir 5 cartes en main au lieu de 3 en fin de pause). 

Et au niveau 5, on peut participer à un projet de conservation, soit ceux de départ, soit un de notre main donnant de nombreux points de conservation et donnant de bonus immédiat et/ou à chaque pause café en plaçant sur la carte les cubes de notre plateau de départ. 

Améliorer la carte permet de faire plusieurs projets à la fois et surtout de faire des dons à des ONG donnant des points de conservation bonus. 


Le joueur actif peut aussi passer son tour en déplaçant une de ses cartes pour la placer sur la colonne 1 de son plateau, il récupère en compensation 2 jetons X avec un maximum de cinq jetons. 

Ces jetons permettent d'augmenter artificiellement le niveau de la carte prise. 

Si je prend la carte animaux du niveau 3, en défaussant 2 jetons X, on estime qu'elle est au niveau 5.


Au mieux, on ne pourra améliorer que 4 cartes donc il faudra bien faire ses choix… 


La pause café (ou cacolac pour ceux qui n'aiment pas le café) fait un peu l’équivalent de fin de manche. Le premier joueur à y arriver récupère un jeton X puis chaque joueur doit réduire sa main de cartes à 3 (ou 5 s’il a la bonne université), on enlève les jetons bonus ou malus, on change les 2 dernières cartes de la piste de réputation et on remet de nouveaux tokens universités et zoos partenaires s’il y en a de pris.

Puis les joueurs récupèrent des crédits en fonction de leurs kiosques construits et de leur niveau sur la piste d’attrait, puis il gagne des bonus en fonction des cartes mécènes et des cubes placés sur les projets de conservation. 

On replace la grosse tasse sur la case de départ et on peut reprendre la construction du parc après avoir bu son café en disant du mal des collègues absents, du patron et de sa femm… et c’est déjà pas mal.


La partie se termine lorsque les jetons d’attrait et de conservation se croisent.

On ajoute les bonus de certaines cartes mécènes et de sa carte objectif final (une des cartes étant défaussée au cours de la partie).
Pour finir, on soustrait la valeur de la piste de conservation (on prend le chiffre le plus bas de la piste d’attrait dans la zone du jeton de la piste de conservation) à celle de la piste d’attrait (les fins matheux auront tout de suite compris qu’on peut se retrouver en négatif, si notre stratégie n’a pas pris l’essor voulu).

Le vainqueur verra son zoo porté aux nues par la communauté scientifique en tant que fleuron de la repopulation des espèces protégées.

Pour les perdants, ils animeront les parcs animaliers de France, et le pauvre loup du Bois de Saint Pierre ne sera plus si seul. 


Un exemple de fin de partie, 
avec le plateau dans le sens "joueurs face à face"


À 2 joueurs : Il s'agit surtout de bloquer : 

- on va mettre des jetons neutres sur certaines cases des 3 cartes projets de conservation, empêchant de scorer certaines valeurs.

- on bloque aussi l’accès au don de plus faible valeur. 

- on réduit le nombre de cases avant de se mettre en pause. A 2 joueurs, on est un peu syndicaliste, moins travailler pour être plus payé. Comme dirait Mini J avant de commencer quoi que ce soit, il est important de faire "une pitite pause".


Dès sa première présentation au public, Ark Nova a créé une hype autour de lui. 

Sa DA n’y est pas pour rien, le jeu est beau et de qualité, le matériel épais et agréable à manipuler, même si la tasse à café a dû être retournée dans le bon sens pour comprendre ce que c’était. 

Les cartes, le cœur du jeu, sont splendides avec des photos et représentations animales dignes de plus grands maîtres en la matière, on passe presque autant de temps à l’admirer qu’essayer de la poser. 

Le matériel prend de la place et une grande table sera nécessaire pour pouvoir être à l’aise, en même temps on tente de faire un zoo, pas un parc à cloportes

Le grand nombre de cartes permet une très belle rejouabilité, reste à voir s’ils feront une extension avec des dinosaures… 

Bah quoi, ce n’est pas le même jeu pour faire des parcs à dinos ? 

Les dinosaures, ça va avec tout d’abord… 

Je suis sûr qu’on pourrait faire un scénario de Mémoire 44 avec un T-Rex et deux vélociraptors qui s’appelleraient "la bataille de la crête assez". 


Nous n’aurons fait ici qu’effleurer les règles du jeu tant très vite on s’aperçoit qu’elles sont profondes et bien amenées. 

En effet, mise à part certains effets de cartes ou de jetons qui demandent parfois de relire un point de règle pour confirmer ce qu’on en a compris, l’iconographie est claire et l’aide de jeu facile à prendre en main pour confirmer l’action douteuse. 

Cette prise en main rapide permet de se plonger dans le jeu comme un pingouin dans son bassin, et quand on relève la tête hors de l’eau, on s’aperçoit que le café est froid, que les étoiles sont dans le ciel et que Mme J a perdu après 2 heures de partie que personne n’a vu passer, donnant une certaine satisfaction et un record du monde d’apnée dans un bassin plein de pingouins. 

*Mme J n'a pas perdu, elle t'a laissé gagner, pour te faire plaisir !*


On se plonge très vite dans son parc, il faudra un certain nombre de tours pour commencer à monter sur la piste de conservation.

On commence petit avec son parc animalier, 3 cochons d’Inde et un lapin nain qui n’attirent pas franchement la population, à part les jeunes parents qui cherchent à occuper leur.s gosse.s qui pourront traumatiser des bêtes à poil. Pauvres bêtes qui ne feront pas "pouet" quant on les presse, malgré les 12 pancartes "ne pas toucher".

Ccela donnera 20 minutes de repos avant d’entendre hurler "Mini J, on ne met pas les doigts dans le nez de la chèvre" ou encore "non Jean Kévin !!! Le caca des pigeons, c'est caca ! Faut pas manger !", ou peut-être "Lovcraftina, range immédiatement ce couteau sacrificiel, on invoque pas Shub Niggurat en public!!!"

Enfin, ce genre de phrase qu’on entend dans tous les parcs à chèvres du monde.

Mais une fois que le moteur commence à ronronner, les cartes s’enchaînent et les scores augmentent, transformant votre parc à chèvres en zoo somptueux à même d’accueillir les plus beaux animaux que l’évolution a placé sur notre planète : rhinocéros blancs, tigres de Sumatra, condors du Pérou, ornithorynques (juste parce qu’on croirait que l’évolution a fait un Boggle avec les autres animaux pour le créer), Mme J oups pardon un porc-épic à crête (la défaite peut la rendre piquante alors des fois je confonds)… 

Et du coup, fini les cris, juste des ébahissements devant vos merveilles, on augmente les entrées donc les fonds pour avancer sa conservation d’espèces menacées, tout est logique et s’enchaînent pour faire de ce jeu une superbe création ludique qui restera probablement dans les annales.


Souvent comparer à Terraforming Mars (pas pour le design qui reste un des plus vilains qu’il nous a été donner de voir, c’est la planète rouge bordel, pas la planète maronnasse), mais pour son côté construction de moteur avec pléthore de cartes, associée à des badges pour les conditions de pose, et de stratégies pour arriver à ses fins.

On retrouve aussi le décompte de l’excellent Raja Of the Ganges, et quand on mixe de très bonnes mécaniques déjà connues, auxquelles on rajoute une touche de génie cela fait une réussite incontestable dans la gamme expert.


👉 Alors, à 2 c’est mieux ? 


Les petites touches pour ajuster les règles à 2 joueurs sont suffisamment dosées pour maintenir une tension constante.

Si on décide de ne pas améliorer sa carte associatif, on ne sera pas trop défavorisés par les dons de l’adversaire, car ils seront d’entrée de jeu plus coûteux, les cartes projet sont toujours une vraie course pour avoir la zone de scoring souhaitée, car il n’en reste que 2 possibles et ce n’est pas toujours évidents de réaliser le plus grand score de la carte quand il ne reste que lui disponible… 


L’interaction de ce jeu reste assez limité, chacun à tendance à faire son parc dans son coin, même si un zoo partenaire est pris par l’adversaire, il reviendra après la pause évitant les blocages.

Il reste quelques animaux pernicieux entraînant des effets sur l’adversaire (hypnose, venin, etc.) qui permettent tout de même d’empêcher l’adversaire de faire ce qu’il veut, d’autres servent à voler quelques crédits, etc.


D’un point thématique ça casse un peu le réalisme du jeu (je ne vois pas pourquoi avoir mis mon serpent à sonnette dans mon parc entraînerait un empoisonnement du directeur adverse), mais d’un point de vue ludique ça donne juste la touche d’interaction suffisante, car ni trop pénalisant ni avantageux (l’effet se termine à la prochaine pause) pour éviter de faire un jeu solo à plusieurs, ou une intense frustration quand l’action de l’adversaire ruine 1 h 45 de stratégie. 


Tout est bien pensé pour que, quel que soit le nombre de joueurs, il soit une pure réussite, la seule différence notable reste le temps de jeu qui sera conséquent à 4 joueurs… 


Un dimanche où il faisait beau, ni une ni deux, on part au zoo, celui de Mme J évidemment, pour admirer les ours blancs; ticket en main, on rentre enfin… 

Les connaisseurs des Chattes Hurlantes attaqueront le zoo pour déposer les animaux chez Momo, un gars sympa qui tanne les peaux, les autres iront rapidement s’offrir ce jeu pour les dimanches pluvieux… 

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